Une intimité rare avec Zola photographe, interview de Lionel Riess restaurateur
Choisi par le département photographique de la MAP pour restaurer les plaques négatives détériorées du fonds Zola, Lionel Riess est un jeune praticien dont l’expérience est déjà riche et significative.
Bruno Martin : Lionel Riess, pourriez-vous résumer en quelques mots votre cursus et le début de votre carrière ?
Lionel Riess : Je suis diplômé du Master de conservation-restauration de l’Inp (Institut National du Patrimoine) en spécialité photographie, suite à un cursus ponctué de stages en France et à l’étranger. Professionnel indépendant depuis septembre 2017, je mets en œuvre des interventions de conservation préventive et de restauration sur des fonds photographiques historiques et contemporains conservés par des collections publiques et privées – comme le musée des Arts Décoratifs de Paris, le musée Guimet, le musée Unterlinden de Colmar.
BM : Quelle est votre éthique de restaurateur ?
Lionel Riess : J’envisage toujours les interventions que je pratique dans un cadre déontologique mettant en avant l’innocuité, la réversibilité et la lisibilité des traitements.
BM : Pouvez-vous brièvement décrire les dégradations dont souffrent les plaques photographiques du fonds Zola ?
Lionel Riess : Elles présentent les altérations typiques de ce type de procédé : altérations chimiques de l’image, encrassement, bris. Une part importante est atteinte par des décollements d’émulsion de grande ampleur, s’expliquant par un défaut originel dans la fabrication des plaques et/ou des conditions de conservation inadéquates.
BM : Pour éviter aux plaques de verre, fragiles, les aléas d’un déplacement, la restauration aura lieu au département photographique de la MAP, au fort de Saint-Cyr, où elles sont conservées. En quoi va consister votre travail ?
Lionel Riess : L’intervention envisagée doit permettre de rendre les plaques lisibles et manipulables et d’éliminer les sources de dégradation, prolongeant ainsi la durée de vie des matériaux. Concrètement, chaque plaque sera nettoyée et celles présentant une altération mécanique (fêlure, cassure, décollement d’émulsion) seront doublées par un verre de faible épaisseur. Cette technique permet de redonner une cohésion à la plaque et ce sans collage.
BM : Par rapport à des positifs, plus immédiatement accessibles, quels enseignements spécifiques peut-on tirer, selon vous, de la restauration et de l’étude d’un tel ensemble de négatifs ?
Lionel Riess : Dans la pratique photographique les négatifs ne sont pas des objets finis, mais des documents de travail dont l’observation permet de découvrir l’art du praticien (retouche, renforcement, recadrage, etc.). Cette restauration permettra donc, outre la mise en place de conditions de conservation saines, une intimité rare avec Zola photographe.

Interview réalisé par Bruno Martin, chargé d'études documentaires du département de la photographie de la MAP, en charge du fonds Zola.